" CONFIANCE ! N’ayons pas
peur !..."
16-17 Janvier 2015,
16-17 Janvier 2016. Déjà un
an !
Aujourd’hui, nous faisons mémoire dans le silence et la prière, en nous souvenant des jours difficiles
que nous avons vécu en voyant : nos personnes pourchassées et
agressées ; nos Eglises, nos
écoles, nos maisons d’habitations, nos presbytères et les biens de nos
chrétiens saccagés et brûlés par une foule révoltée de croyants musulmans au
Niger, suite aux caricatures de « Charlie Hebdo » sur la personne du
Prophète Mohamed en France. Ces journées des 16 et 17 janviers 2015 furent des moments terribles, horribles et indescriptibles
qui s’abattirent sur les chrétiens et qui furent organisés et perpétrés par des
jeunes musulmans.
Aujourd’hui, un an après ces événements de violences, les souvenirs sont encore là, visibles sur le terrain à
Zinder, à Niamey ainsi que dans les
localités où les chrétiens ont été victimes de la colère et des exactions des
musulmans.
En initiant les
trois jours (triduum) de prière, les 15-16 et 17 janvier 2016, nous voulons,
dans la foi et l’espérance, prier le Seigneur et nous confier à Lui, nous
abandonnant entre ses mains, Lui qui est le maître de la vie et de l’histoire.
Nous voulons aussi porter nos frères et sœurs musulmans dans nos prières en
imitant Jésus en croix qui n’a pas hésité à prier pour ces bourreaux en disant,
les bras étendus sur la croix : « Père, pardonne- leur car ils ne savent pas ce qu’ils font »
(Luc 23, 34). Nous n’oublions pas non plus, les paroles du Christ qui nous dit
toujours : « Il n’y a pas de plus grand amour que de
donner sa vie pour ceux qu’on aime…Vous êtes mes amis, si vous vous aimez les
uns les autres. » (Jn. 15, 12-13). Cet amour que le Christ nous
invite à vivre et à témoigner, va jusqu’à l’amour de l’ennemi : « Vous avez entendu qu’il a été dit :
« Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! Moi je
vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de
devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur
les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les
injustes. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense
aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et
si vous réservez vos saluts à vos frères, que faites-vous
d’extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ?
Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »
(Mathieu 5, 43-48).
Pour suivre le Christ,
nous avons besoin de son aide et de son secours. Sans Lui, nous ne pouvons rien
faire. Mais avec Lui nous pouvons déplacer les montagnes. Demandons donc au
Christ de nous donner la force et le courage de nous adosser à lui pour nous
laisser conduire par son amour en cette Année Sainte de la Miséricorde ou le
Pape François nous invite à vivre et à témoigner de la Miséricorde Dieu.
Frères et sœurs
bien-aimés de Dieu, laissons-nous illuminer par les projecteurs de l’Année de la Miséricorde. Les événements violents que nous avons vécus les 16 et 17 janvier 2015 nous invitent à
réfléchir en nous adossant sur l’Année
de la Miséricorde et à demander à Dieu
de nous aider à voir et à comprendre ce
que nous devons faire en tant que fidèles croyant en Dieu qui est Amour et
tendresse, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité. » (Ex.
34,6). Faisons de ce Jubilé un temps favorable pour nous tous, afin qu’en regardant
la miséricorde de Dieu qui dépasse toutes les limites humaines et qui brille
sur la nuit du péché, nous devenions à notre tour, des témoins plus décidés et
plus forts de cette Miséricorde divine.
L’Eglise nous donne de vivre l’Année
Sainte pour connaître dans nos vies le pardon de Dieu, et sa présence à nos
côtés, surtout dans les moments où nous en avons le plus besoin. Nous devons rechercher, chacun
individuellement et tous communautairement, à faire « ce qui plaît à Dieu » en cette Année de la
Miséricorde, pour être crédibles aux yeux des hommes et des femmes. Ecoutons
donc ce que nous dit le Pape François : « La crédibilité de l’Eglise passe par le
chemin de l’amour miséricordieux et de la compassion. L’Eglise « vit un
désir inépuisable d’offrir la miséricorde ». Peut-être avons-nous parfois
oublié de montrer et de vivre le chemin de la miséricorde. D’une part, la
tentation d’exiger toujours et seulement la justice a fait oublier qu’elle
n’est qu’un premier pas, nécessaire et indispensable, mais l’Eglise doit aller
au-delà pour atteindre un but plus haut et plus significatif… Il est triste de
voir combien l’expérience du pardon est toujours plus rare dans notre culture…
Sans le témoignage du pardon, il n’y a qu’une vie inféconde et stérile, comme
si l’on vivait dans un désert. Le temps est venu pour l’Eglise de retrouver la
joyeuse annonce du pardon. Il est temps de revenir à l’essentiel pour se
charger des faiblesses et des difficultés de nos frères. Le pardon est une
force qui ressuscite en vie nouvelle et donne le courage pour regarder l’avenir
avec espérance. » (Miséricordiae Vultus N° 10).
Heureux serons nous si nous savons
pardonner à ceux qui nous ont offensés. « Heureux les miséricordieux, car
ils obtiendront miséricorde » (Mt. 5,7).
Frères et sœurs, ne perdons pas
l’espérance de nous voir en 2016, chacun, engagé fermement et avec confiance, à
différents niveaux, à promouvoir la justice et à œuvrer pour la paix. Comme
nous témoigne le Pape François, sachons que si « la
paix est don de Dieu, elle est aussi l’œuvre des hommes. Oui, la paix est don
de Dieu mais don confié à tous les hommes et à toutes les femmes qui sont
appelés à le réaliser. Cette paix
demande aussi un dialogue sincère entre les religions. » Raison pour
laquelle il nous faut réfléchir et voir comment nous pouvons approfondir et
rendre le Dialogue Islamo-Chrétien plus crédible et efficace au Niger. Cela
nous demande de sortir et d’aller à la rencontre de nos frères et sœurs
musulmans dans un esprit d’amour, de collaboration et de recherche, pour une
vie sociale plus fraternelle. Evitons, comme nous le dit le Pape François, « de
tomber dans l’indifférence qui constitue une menace pour la famille humaine...
Nous devons vaincre l’indifférence qui nous menace et conquérir la paix ».
Aussi, je voudrais que nous prenions en considération le milieu des jeunes pour
mettre en place une pastorale d’accompagnement des jeunes. Ils sont l’avenir du
Niger. Nous pouvons réaliser des merveilles si nous arrivons à faire en sorte
que jeunes chrétiens et jeunes musulmans travaillent ensemble et collaborent
pour mener des actions de solidarité communes dans le but de créer des liens
d’amitié et de fraternité pour la promotion de la paix et de la justice.
Des initiatives d’actions
sont déjà à l’œuvre dans la paroisse de Konni, dans le cadre du Dialogue Islamo-Chrétien.
Nous espérons poursuivre ces initiatives dans les autres paroisses du diocèse
avec la grâce de Dieu cette année.
Enfin, j’invite
chaque baptisé à reconnaître comment l’indifférence et la peur se manifestent
dans sa propre vie, et à adopter un engagement concret pour contribuer à
améliorer la réalité dans laquelle il vit, à partir de sa propre famille, de
son voisinage ou de son milieu de travail.
Aux permanents
du diocèse : prêtres, religieux et religieuses, je nous invite à être des veilleurs,
des éclaireurs avisés et des serviteurs au milieu de nos communautés
chrétiennes et à aider chaque baptisé à vivre et à témoigner de sa foi
chrétienne en vérité et avec amour au milieu de ses frères et sœurs musulmans. L’Eglise
Famille de Dieu qui est au Niger ne peut pas faire l’économie du
« Dialogue Interreligieux ». C’est pour nous une nécessité vitale et
urgente dans notre pastorale d’évangélisation. L’occulter serait faire preuve
d’ignorance qui mènera notre communauté vers un suicide pastoral.
Que Marie, Notre
mère, nous accompagne et obtienne de son Fils Jésus, Prince de la Paix,
d’exaucer nos prières et de bénir nos engagements quotidiens pour un monde
fraternel et solidaire.
+
Ambroise Ouédraogo
Evêque
de Maradi.
Maradi le 8
janvier 2016
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