La vie allait s’enfuir, à un moment où personne ne s’y attendait. Par cette blessure, ont jailli tant de questions. La foi a pris un coup. Et les cœurs ont été attristés. Comment faire durer la vie ? Comment faire durer l’instant ? Le psaume ne dit-il pas ‘‘Qu’il est bon pour des frères de vivre ensemble et d’être unis, on dirait un baume précieux, un parfum qui descend sur la barbe d’Aaron’’. Mais en fait, nous sommes tous des pèlerins sur cette terre…et donc le temps s’est vidé, pour faire place au silence. Le vide d’un silence qui parle plus que la présence : le Père Gilbert s’en est allé !
Il y a de cela un an. C’était dans la nuit du 13 au 14 février 2013, que cet événement marquant était survenu : le décès du Père Gilbert Yougbaré. Quand était-il exactement décédé ? Nul ne le sait avec précision, sinon Dieu ! Toujours est-il, cette date du 13 février de l’an 2013, coïncidait avec le début du carême. Sans doute un signe de conversion pour notre vie foi !
Le Père Gilbert avait en effet célébré les cendres, et comme d’habitude, avait offert aux fidèles chrétiens de la Paroisse Notre Dame de Lourdes, le vrai Pain de Vie, le Pain de la Parole de Dieu. Il aimait cela ! Une homélie non seulement belle, mais aussi très enrichissante. Après une journée de jeûne, et après avoir célébrer l’Eucharistie, ils se sont mis à table : Le Père Ila, l’Ab. Narcisse (alors stagiaire à la Paroisse Notre Dame de Lourdes) et Francis Ilboudo. J’étais pour ma part au Burkina-Faso.
A table, le Père Gilbert n’avait pas mangé grand-chose, car il disait qu’il ne se sentait pas bien. Les discussions étaient belles, le Père Gilbert par la suite se retira pour se reposer. Mais, ce fut véritablement un repos au près du Père éternel !
Ce petit mot que je vais adresser au Père Gilbert, est une manière pour moi, de célébrer une ‘‘présence-absente’’ de l’homme que je nomme : GILBERT OU CELUI QUI OFFRAIT LE PAIN DE LA PAROLE DE DIEU !
La Communauté Rédemptoriste de la paroisse cathédrale de Maradi et les fidèles, garderont toujours ton souvenir. Un souvenir indélébile, un souvenir qui ne s’effacera jamais de leur mémoire. Une présence vivante de toi, c’est-à-dire du prêtre mais surtout du religieux qui avait un grand sens de son état de vie. Oui, religieux tu l’as été, religieux tu l’es et religieux tu t’en es allé. N’est-ce pas la joie de saint Alphonse Marie de Liguori notre fondateur? N’est-ce pas la joie et la fierté des saints et bienheureux rédemptoristes ? Quand on meurt dans la congrégation, c’est la fête ! Et toi Gilbert, quand tu étais avec nous, tu nous offrais toujours la possibilité de participer joyeusement à la fête du grand banquet par excellence : l’Eucharistie. Ce repas au cours duquel, tu nous offrais les délices de la Parole de Vie. C’est pourquoi, j’aime t’appeler Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Nous t’avons accueilli dans notre communauté rédemptoriste il y a de cela 6 mois. Nous sommes arrivés ensemble à Maradi fin Septembre 2012. Tu as consacré, et mis à profit ton temps pour l’apprentissage de la langue haoussa. Chose que tu faisais avec engouement et passion. Pour preuve, tu séjournais dans les villages, rien que pour te familiariser avec les gens et pouvoir parler le houssa. Ce temps t’avait été consacré, avant que tu n’embrasses une quelconque activité de la paroisse. Mais, tu avais aussi ton tour de célébration liturgique. Un moment privilégié, pour nourrir le peuple de Dieu du Pain de la vie. La Parole de Dieu avait trouvé en toi, un canal formidable pour se répandre à profusion dans les cœurs. Ainsi, tu nourrissais ceux qui avaient faim et soif de Dieu. Laisse-moi donc, pour ainsi dire t’appeler Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
La communauté rédemptoriste, aimait ta façon d’offrir le Pain de la Parole de Dieu. Tu le faisais de manière soignée, car tu avais un faible pour tout ce qui est propre. Et d’ailleurs, à l’occasion de tes funérailles, tous les vases sacrés avaient été soigneusement lavés. Une sœur me confiait de manière rassurante : ‘‘ Père Ibrahim, aujourd’hui, le Père Gilbert sera content’’. Moi aussi, j’étais convaincu que le Père Gilbert allait être aux anges à la vue du soin porté aux vases. C’était donc pour te faire plaisir, à toi Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Un prêcheur de tout cœur
Les développements de ta pensée, débouchaient toujours dans la lumière, et laissent émerger une voie spirituelle profonde, pertinente et parfois nouvelle. Au-delà de la joie qu’apportait le message évangélique que tu offrais, il y avait comme un feu qui brûlait dans le cœur de ceux qui t’écoutaient. Tu prêchais de tout ton cœur. On le remarquera en particulier dans tes belles homélies. Mais en fait, c’était la Parole de Dieu que tu offrais de manière convaincue et convaincante, avec une vigueur et une ténacité impressionnante, à tel point que nos cœurs en recevant cette parole, tentaient de se dilater, pour nous plonger dans un amour sans frontières, un amour authentique, un amour vrai. Nous comprenions dès lors, que tu déversais sur nous, le feu de ta méditation intérieure. Car, tu n’étais jamais en retard à toutes nos prières communautaires. Et lorsque tu y manquais, il y avait toujours un motif pertinent, et tu le disais. En réalité, tu offrais ce que tu avais contemplé et médité. C’est pourquoi, je me permets de t’appeler Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Tu parlais du fond de ton intériorité, pour nous aider à accéder à notre propre intériorité. Ta parole était si forte, si brûlante, si claire et si tranchante qu’elle ne peut qu’attester la présence de Dieu. Tu offrais tout chaud, les plats de la Parole de Dieu. Merci Gilbert parce que ce n’était pas du réchauffé, mais des plats servis juste après une bonne préparation. C’est la preuve que le Saint Esprit ne se met pas en conserve, il se consomme tout frais. C’est pourquoi, je crois ne pas avoir tort de t’appeler Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Tu te savais faible de santé. Tu as connu l’épreuve de la souffrance. La preuve, tu n’as pas achevé le noviciat avec nous. Je me rappelle encore de cette tuberculose, qui te clouait au lit. Je me rappelle encore de cette injection douloureuse, une injection difficile, qui te maintenait raide pendant une bonne heure. Toi, tu la supportais, mais, tes vaillants compagnons, en te regardant fondaient en larmes. Oui, tu as connu la souffrance ! Mais quelquefois, tu étais têtu et caïd, refusant de prendre soin de toi. Tu te négligeais et voulais vaille que vaille, t’administrer toi-même tes propres soins à la grande surprise de tes soignants. Je te comprends, tu es un homme de caractère ! Tu étais aussi à nos yeux en quelque sorte comme un conservateur. Tu as toujours été un "jusqu’au boutiste" dans ta façon de voir les choses. C’est-à-dire d’une façon absolue, totale et pleine. Tu l’étais tout aussi dans ta façon de travailler. Tu t’investissais corps et âme dans ce que tu fais. Et surtout en ce qui concerne le service de la Parole de Dieu. Ainsi, c’est à juste titre que je peux t’appeler Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Au terme de notre session des jeunes prêtres de moins de 5 ans ; toi et moi étions entrain de mûrir l’idée selon laquelle, on mettrait en place une toute petite école de la foi où, tout le monde pourrait venir puiser aux sources vives de la Parole de Dieu. Rencontrer le Christ dans le Pain de la Parole Dieu, et dans son Corps et son Sang, voici l’essentiel de ce que tu t’es efforcé à faire toi Gilbert ou celui qui offrait le Pain de la Parole de Dieu !
Merci à toi Gilbert d’avoir incarné si profondément parmi nous la constitution 20 des rédemptoristes : ‘‘Fermes dans la foi, joyeux dans l’espérance, fervents dans la charité, brûlants de zèle, conscients de leur faiblesse et assidus à la prière, les Rédemptoristes, en hommes apostoliques et en disciples authentiques de saint Alphonse, heureux de continuer le Christ Sauveur, participent à son mystère et l’annoncent tant par la simplicité de leur vie et de leur parole que par leur disponibilité constante pour les tâches ardues, dans l’abnégation d’eux-mêmes, afin d’apporter aux hommes une abondante Rédemption’’.
Pour finir très cher Gilbert, j’ai cherché, j’ai fouillé un peu partout pour savoir ce que je pouvais t’offrir en ce jour. Mais hélas ! En dernier ressort, je me suis souvenu d’un chant qui pouvait te réjouir et plus encore, un chant auquel tu t’identifie certainement.
Comme Lui savoir dresser la table
Comme Lui, nouer le tablier
Se lever chaque jour
Et servir par amour
Comme Lui !
1.Offrir le Pain de sa Parole
Aux gens qui ont faim d’être aimé
Etre pour eux des signes du Royaume
Au milieu de notre monde
2. offrir le Pain de sa présence
Aux gens qui ont faim d’être aimés
Etre pour eux des signes d’espérance
Au milieu de notre monde
3. Offrir le Pain de chaque Cène
Aux gens qui ont faim dans leur cœur
Etre pour eux des signes d’Evangile
Au milieu de notre monde
La vie continue à vivre !
Je sais que tu vis Gilbert !
C’est l’essence de espérance qui nous définit en tant que chrétiens !
Que ton âme repose en paix !
Ibrahim Seydou
Missionnaire Rédemptoriste
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