mardi 10 septembre 2013

Les mystères glorieux à partir du récit du bon Samaritain en Luc 10, 25-37


Chers frères et sœurs, permettez-moi d’ouvrir la page de cette réflexion qui est au fond, mon expérience de la retraite de trente jours à Kotobi en Côte d’Ivoire, par cette citation de Marie MANZOTTI qui souligne que : « Pour vivre en mieux un temps de retraite, il faut choisir celle-ci en fonction de ses affinités spirituelles et de ses attentes : on peut vouloir souffler un moment, prendre une décision fondamentale ou bien former son intelligence et son cœur. Mais on doit aussi trouver une attitude juste pour pouvoir déjouer les pièges classiques de tels séjours. » [1]Anselm Grün réponds à cette préoccupation en nous proposant le silence comme attitude adéquate pour un tel exercice, lors qu’il dit que : « Le silence est d’abord une aide, pour pouvoir prier, tourner son esprit vers Dieu, en vue d’écouter avec recueillement la Parole de Dieu. »[2] Quelle est cette aide que le silence de la retraite à Kotobi m’a apportée et que je désire vous partager sous ces lignes ? Au fond, je me demande si j’étais réellement en silence pendant ces trente jours? Car, dois-je vous avouer, je n’ai jamais parlé aussi autant que pendant cette retraite. Je n’ai jamais causé autant, avec la même personne pendant trente jours et sur le même sujet. A vrai dire, je n’étais pas en silence ! Je parlais, je causais, j’interrogeais un Homme. Curieusement, me semble-t-il, c’est cela le vrai silence de la retraite dont parle Anselm Grün: Parler avec et à un Homme, être « … ouvert au mystère de Dieu dans l’intimité, dans la parole et dans les personnes. »[3] Si tel est le cas, j’étais alors en silence puisque, l’avouerai-je, j’avais voulu faire l’expérience de la rencontre avec le Seigneur, m’ouvrir à son mystère d’amour pour apprendre à l’aimer davantage, à l’écouter et surtout à me soumettre à sa volonté, à être docile à sa loi d’Amour. C’est tout l’enjeu de l’expérience de ma retraite de trente jours.

Comme vous le remarquez, il s’agit ici de mon expérience de la retraite de trente jours que je viens de faire à Kotobi en Côte d’Ivoire ; trente jours de méditation, de contemplation, de prière et de partage en ‘face de Dieu’ comme pour Jacob qui fit l’expérience de Dieu, « … l’interrogea et lui dit : “Révèle-moi ton nom”. Il répondit : “Pourquoi demandes-tu mon nom ?” Mais là, il le bénit. Jacob donna à ce lieu le nom de Pénouël car, dit-il : “J’ai vu Dieu face à face et j’ai eu la vie sauve.”  (Gn 32 30-31). Peut être cela ne fut pas mon cas. Mais je peux vous avouer que j’ai au moins, fais moi aussi et à mon niveau, l’expérience personnelle de la rencontre avec le Seigneur, Maître et Dieu de tout, le Créateur des cieux.

En effet, comme cela se fait chaque année après la première année de théologie, les jeunes en formation chez les Missionnaires d’Afrique font la retraite ignacienne de trente jours. Cela semble être un programme normal inscrit dans les exigences du cursus de leur formation. Laissez-moi vous dire cependant qu’en plus d’être une exigence de la formation, cette retraite fini par devenir « ma retraite », une grâce de sorte que le silence y observé « permet à la grâce de Dieu de descendre en nous…il faut le respecter coûte que coûte. Non seulement en s’abstenant de parler, mais aussi en évitant de se disperser avec un bon roman, son téléphone portable ou du travail emporté. »[4]. Ce fut aussi par grâce que je fus aligné parmi les candidats qui devaient faire leur retraite à Kotobi accompagnés d’une dame Marie Pierre N’Guessan qui, depuis sept ans, accompagne les jeunes en formation chez les Missionnaires d’Afrique de la Fraternité Lavigerie d’Abidjan pour cette retraite de trente jours. Je reconnais par dessus tout, que je ne fis pas partie de la première promotion ni de la dernière à faire cette retraite de trente jours pour pouvoir ‘prétendre’ vous partager ce que j’ai vécu comme expérience. Comprenez cependant que les motivations, les convictions et les visions des choses dépendent des personnalités différentes et des individualités particulières. Je solliciterai par ce fait, la clémence, la tolérance et l’indigence de tout lecteur au regard trop critique.

Le point central de ce partage est, comme l’annoncé le titre, une méditation-contemplation que je fis sur le texte de Luc 10, 25-37 : l’Evangile du bon Samaritain. Voilà que le dimanche 14 Juillet 2013 dimanche du bon Samaritain, selon l’Evangile proclamé ce dimanche, il me fut demandé de diriger la prière du chapelet. Dans mon silence, l’Esprit me ramènera à l’Evangile du jour pour y contempler, comme l’indique la prière du Temps présent de vendredi de la deuxième semaine, comment la gloire et la sagesse inexprimables de Dieu se manifestent étonnamment dans le scandale de la croix. L’agression dont fut victime cet homme de l’Evangile qui descendait de Jérusalem à Jéricho et tomba au milieu de bandits (Luc 10, 30) et le geste de générosité du bon Samaritain peuvent s’inscrire, la première comme une croix et le second comme une victoire du Seigneur sur les forces du mal, une gloire. Voyons alors comment la gloire de Dieu s’est manifestée dans l’agression de cet homme tombé entre les mains des bandits.

Chers lecteurs et lectrices, permettez-moi de vous avouer que ce texte ne m’a jamais parlé autant que ce jour et pourtant, ce texte nous était déjà proposé parmi les textes des oraisons du deuxième jour de la retraite. Ce que je conçois comme une grâce de cette retraite. Pourquoi alors l’Esprit me ramena à un texte? C’est toute la problématique, permettez-moi l’expression, de la richesse inépuisable des textes sacrés. Comme le dira Saint Ignace de Loyola, « il y a parfois des grâces dont on a besoin et qu’on n’avait pas perçues pendant l’oraison antérieure… » Je ne peux en douter au regard de l’expérience faite et surtout ce que le texte me révéla lors de cette reprise. Il s’agissait cette fois, non pas d’une simple méditation mais d’une contemplation de la scène pour y déceler les différents aspects des mystères glorieux pour la récitation du chapelet de ce dimanche soir. Voir surtout comment la gloire de Dieu qui s’est manifestée dans ce récit du bon Samaritain peut aussi se manifester encore de nos jours dans chacune de nos bonnes actions, dans chacun de nos actes de charité, de générosité et de compassion envers les hommes nos frères.
Voici ce que je recueilli comme fruits de cette contemplation et comment je les exprimais,  demandant que la récitation de ce chapelet que nous inscrivions au cœur du récit du bon Samaritain nous plonge davantage au cœur des Mystères Glorieux de sorte que, progressivement, nous voyons avec les yeux de la foi, pour chaque scène du récit, un aspect de la résurrection, de l’Ascension, de la Pentecôte, de l’Assomption et du Couronnement de Marie au ciel. Et il en fut ainsi.
Ce serait les fruits du silence dont parle Anselm Grün lorsqu’il affirme que : « Le silence est au service de l’écoute, de l’attention à la parole de Dieu. Il rend sensible à la présence de Dieu comme espace où nous nous mouvons, et à la parole de Dieu, qui nous indique le chemin. »[5] Si tel est le cas, voici comment j’ai expérimenté la présence de Dieu dans la compassion du Samaritain dans une réappropriation des Mystères Glorieux à la lumière de ce récit du bon Samaritain :

Premier mystère Glorieux : la Résurrection de Jésus
Pour ce mystère glorieux, contemplons avec les yeux de la foi ce Samaritain qui s’approche de l’homme frappé, blessé et saignant par terre, essoufflé dont les forces de se lever lui manquaient. Le Samaritain, nous rapporte l’Evangéliste, banda ses plaies et y versant de l’huile et du vin comme pour adoucir la peine (Luc 10, 34). Retrouvons ainsi par ce geste combien profond et riche de sens, le symbole de la Résurrection, du retour à la vie pour vivre désormais dans la gloire de Dieu. Cet homme mourant retrouve le souffle de vie.
Prions: Dieu notre Père, nous t’en prions, accorde nous ce cœur compatissant à la souffrance de nos frères et sœurs afin de leur apporter l’assistance et le soulagement qu’il faut à l’exemple de ce Samaritain. Par Jésus-Christ notre Seigneur, Amen.
Deuxième mystère Glorieux : l’Ascension de notre Seigneur Jésus:
« La gloire de Dieu, c’est l’homme débout », disait Saint Irénée de Lyon au quatrième siècle. A suite du verset 34 nous décrit comment le bon Samaritain souleva l’homme gémissant, le chargea sur sa monture et le conduisit à l’auberge. Contemplons maintenant ce Samaritain entrain de soulever cet homme et voyons par ce relèvement pour sa monture par une saine imagination, le signe d’une l’Ascension par une intervention divine.
Prions : Seigneur nous t’en prions, donne-nous la grâce d’agir constamment de façon à permettre à nos prochains de retrouver les forces dont ils ont besoin leur donnant de se tenir debout et vraiment debout de sorte que tous ensemble, animés d’une même foi, cherchons comment t’aimer, te servir et te louer par notre vie afin que toute notre vie devienne une louange à ta gloire. Toi qui vis et règne pour les siècles des siècles, Amen.

Troisième mystère Glorieux : la Pentecôte :
Comme d’aucuns ne l’ignorent, la pentecôte se célèbre bien après la pâque soit cinquante jours après et évidemment bien après la fête de l’Ascension. Comment l’insérer alors dans notre récit du bon Samaritain ? Le récit nous relate en effet que « Le lendemain il sort deux pièces d’argent et les donne à l’hôtelier en lui disant : Fais pour lui le nécessaire ; si tu dépenses davantage, je te le rembourserai au retour. » (Luc 10,35) Que ne trouvons-nous pas des similitudes avec la présence de Jésus à ses disciples lors de la pentecôte ? ce Jésus qui apparaît à ses disciples cinquante jours après, insuffla non pas deux pièces d’argent comme pour le Samaritain mais l’Esprit-Saint à ses disciples, le défenseur jusqu’à son retour.
Prions : Dieu de bonté qui ne laisse jamais tes enfants orphelin mais nous laisse toujours en compagnie d’un défenseur. Donne-nous un cœur qui sait partager et supporter la souffrance de ceux qui peinent et se trouvent sans défense. Nous te le demandons par Jésus le Christ ton Fils notre Seigneur, Amen.

Quatrième mystère Glorieux : l’Assomption de Marie.
Par l’Assomption l’Eglise nous propose toujours de célébrer la montée de Marie au ciel par la grâce de son Fils. Car ce corps glorieux qui a porté le Seigneur de gloire ne pouvait guère connaître la corruption du tombeau. De-même, le corps du saint homme tombé entre les mains des bandits et dont la douleur des coups de bastonnade et de matraque qui ont défigurèrent son visage auraient suffit par ce fait, à servir de pénitence pour l’expiation de ses nombreux péchés, ne pouvait rester cloué au sol. L’homme fut ainsi guéri, enlevé du sol pour se tenir debout en signe de la gloire de Dieu (Saint Iréné de Lyon).
Prions : Seigneur Dieu, notre vie sur terre est un pèlerinage sans cesse vers une vie où tu seras tout en tous. Toi qui connais le poids de nos années, la misère des hommes et notre indigence ; toi qui ne cesse de nous venir en aide depuis la création sinon notre vie tomberait en ruine. Nous t’en prions ! Inspire-nous jour pour jour la voie la meilleure pour l’expiation véritable de nos fautes. Toi qui exauças la prière de Marie aux noces de Cana, amen.


Cinquième mystère Glorieux : le Couronnement de Marie au ciel.
Les mérites et les innombrables sacrifices de cette femme, la Sainte patronne des veuves toujours vierge ne pouvaient que lui valoir un couronnement méritoire dans le ciel. Imaginons alors la joie au ciel pour Dieu et ses anges pour cet acte de générosité, de compassion que posa notre Samaritain à l’endroit de cet homme qu’il ne connaissait pas ; mais aussi la joie des membres de familles de cet homme qui a échappé de justesse à la mort grâce au secours et à l’assistance d’un inconnu !

Prions : Dieu notre Père, notre monde déchiré par des rivalités, des tensions et des divisions de toute sorte fait payer des lourds tributs à tes enfants que nous sommes. Ce sont toutes ces situations calamiteuses, désastreuses et douloureuses que nous subissons et nous enlèvent la joie de vivre, la joie de te louer et célébrer tes merveilles, faisant qu’aujourd’hui notre monde se voit rempli des âmes tristes, désespérées et désemparées. Croire en l’avenir est devenu chimérique. C’est ton image d’un Dieu Père et Maître de tout qui est ainsi ternie. Nous t’en prions, suscite dans notre monde des hommes et des femmes qui savent réconforter et rendre la joie dans les cœurs attristés, des hommes et des femmes qui soient des signes de ta présence sur terre par leur générosité et leur compassion, par leur degré d’amour et de tendresse vrais. Toi qui es Dieu Père, Fils et Esprit-Saint pour les siècles des siècles, amen.
Chers frères et sœurs, que puis-je encore dire de plus sinon vous avouer que je crois et je parlerai ; garder silence c’est s’efforcer à « être totalement présent à moi-même »[6] et être totalement présent à moi-même me donne de prendre conscience des grâces des dons que le Seigneur m’a donnés et surtout de l’être étonnant que je suis. Veuillez m’excuser si jamais vous remarquez que j’ai beaucoup intellectualisé cette expérience spirituelle que je vous partage. « La grâce ne supprime pas la nature », disaient les théologiens de Tübingen. 

Merci Seigneur pour la grâce que tu nous accordes de pouvoir découvrir jour pour jour, les merveilles de ton amour pour nous. Oui Seigneur, Tu es Amour.

KIYE Mizumi Vincent 
Etudiant Missionnaires d’Afrique 
Fraternité Lavigerie d'Abidjan   
                                            
[1 ] Marie MANZOTTI, Réussir une retraite, In Prier, n°346 (novembre 2012, pp.26-28.
[2] Anselm GRÜN, Apprendre à faire silence, Traduit de l’allemand par Charles Chauvin, Paris, Desclée de Brouwer, 2001, p.82.
[3] Ibdem.
[4] François DOM, Réussir une retraite, op. cit., p.28.
[5] Anselm Grün, Apprendre à faire silence, p.75-76
[6] Anselm Grün, Op. cit., p. 20.

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